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Qui veut (encore) du travail ?


La teneur de nos posts est bien sûr apolitique, mais il n’est pas impossible qu’aujourd’hui il suffise à traverser la rue pour décrocher un job. Car oui, le problème du recrutement est désormais global et chronique. La pénurie de candidats affecte la quasi-totalité des domaines d’activité.


Il ne s’agit certainement pas de donner raison ou tort ici à notre gouvernement, mais force est de constater que sa réaction ne s’inscrit pas vraiment dans la tendance de fond. Fin juillet, il a présenté son programme de stabilité à la Commission Européenne. Le texte réaffirme la priorité absolue de l’exécutif français : travailler plus.

Grand écart politique-société qui interroge…


Car, le "détravail" s’invite désormais dans tous les médias. C’est en juillet dernier également que le Figaro a publié cet article au titre un brin provocateur : "Idéalistes, hédonistes ou profiteurs… Ces Français qui ne veulent pas travailler." Dès la rentrée, La Tribune publiait la réaction d’Olivier Severyns, fondateur et CEO de COMBO (ex-Snapshift) : "Ces Français qui ne veulent pas travailler" sont surtout des métiers terrains."


La France s’écharpe plus que jamais sur la valeur travail. Mais que se passe-t-il vraiment ? Peut-on encore considérer ce phénomène sociétal comme uniquement conjoncturel ?

Soyons lucides : il n’en est rien. Soyons positifs : nous avons tout à gagner à nous adapter à cette nouvelle donne. À commencer par les employeurs et les cabinets de recrutement.


Le travail en mode reset

Oui, soyons lucide : le détravail actuel n’a rien d’un caprice de conjoncture.

Au printemps dernier, la revue T, éditée par La Tribune, qui n’a rien d’un média alternatif, titrait ainsi son N° 9 : "Travailler, est-ce bien raisonnable ?".

Un peu de nuance immédiate : il n’y a pas un Big Quit mais des Big Quit. Les raisons pour lesquelles on ne veut pas travailler dans la restauration et celles pour lesquelles on boude un poste de développeur ne sont clairement pas les mêmes. Dans sa tribune citée ci-avant, Olivier Severyns enfonçait le clou : "en tant que patrons et managers, il est grand temps de prendre la mesure de cette vague d’absentéisme et de nous interroger sur les conditions de travail proposées." Or l’étude de la DARES publiée cet été montre nettement leur incapacité à assumer cette réalité. Si 71 % des entreprises du secteur privé ont actuellement des difficultés à recruter, seuls 15 % des employeurs estiment que cette tension est liée aux conditions de travail proposés.

Plaçons également dans la balance la problématique des compétences et de la formation. Ainsi, la formation est bel et bien déficiente en France sur l’ingénierie. Avec une pénurie d’ingénieurs qui affecte les tous secteurs d’activité : industrie, bâtiment, infrastructures, environnement, énergies, géotechnique, conseil en technologie. Selon Pierre Verzat, Président de Syntec-Ingénierie, "L’économie française a besoin de 50 000 à 60 000 nouveaux ingénieurs par an alors que les écoles françaises n’en forment que 40 000 actuellement."

La situation est particulièrement inquiétante sur le secteur numérique, et pas seulement sur les profils ingénieurs. Une étude publiée en début d’année révèle que la maturité numérique (Digital Skill Index) de la France n’est pas brillante : 22/100 contre 33/100 au niveau mondial. Et là, Les raisons ne sont pas tant liées à la carence de structures de formation qu’à des facteurs psychologiques, principalement des préjugés et autres plafonds de verre. Car le paradoxe sur ce secteur est à son apogée avec une génération Z a priori la mieux préparée aux évolutions numériques mais ne disposant pas des compétences recherchées par les entreprises. Pire : 1 sur 5 seulement suit une formation pour acquérir les compétences numériques utiles pour son employabilité. Or sur ce secteur du numérique en plein essor, on ne recherche pas que des ingénieurs. Désamour bien français à l’égard des maths, préjugés sur les niveaux de diplôme exigés, a priori sur le coût des formations proposées, problématique du faible taux de féminisation… Des écoles gratuites existent pourtant et les entreprises disposent du levier de la formation interne…

L’on voit bien que d’autres paramètres sont en jeu.


Le work/life balance

Au fur et à mesure de la publication des études les plus sérieuses, il va bien falloir nous rendre à l’évidence : quelque chose a changé dans notre relation au travail. En profondeur. Durablement.

Le travail semble avoir été relégué à une activité anecdotique de nos vies, à la marge, avec comme conséquence bien réelle par exemple : le reflux du sentiment d’appartenance dans les entreprises. Les jeunes générations notamment ont des états d’âme sur les contraintes liées aux postes qui leur sont proposés. Peut-être ne veulent-elles pas supporter ce que leurs aînés ont longtemps accepté ? Peut-être n’ont-elles pas fondamentalement tort ? Peut-être s’agit-il tout simplement de retrouver un équilibre plus juste ?

Décidément, il s’en est passé des choses l’été dernier ! Nous avons eu aussi droit à la déferlante d’un nouveau buzzword : le quiet quitting ou "démission silencieuse". Tout a commencé avec une vidéo sur Tik Tok dans laquelle un jeune homme évoque le quiet quitting comme le simple fait de "ne pas abandonner son job, mais abandonner l’idée de tout donner à son job." Non seulement ultra viral mais aussi ultra virulent dans les réactions. Surtout de la part de générations qui n’ont pas pu ou pas osé adopter une telle relation au travail. Un vrai choc de génération !

Or, depuis deux ans et demi, nous vivons collectivement une succession de crises démesurées. Pour Sandra Fillaudeau, fondatrice de Conscious Culture, dans un tel contexte, "ce serait même fou de se dire que le rapport au travail ne change pas." La pandémie a bouleversé la porosité entre vie professionnelle et vie personnelle ? C’est précisément sur ce work/life balance qu’il faut travailler estime-t-elle avec une redéfinition de ce que veut dire l’ambition. Côté employeurs, elle propose de "construire des environnements de travail que les salariés n’ont pas envie de quitter" : manager autour de vrais leviers de motivation (qui ne se réduisent pas aux titres ou au salaire !), définir la mission des équipes et la contribution de chacun-e, communiquer clairement (et même communiquer tout court, surtout en interne !), montrer de la curiosité aux premiers signes de changement…


Démission ou réappropriation ?

Il n’est pas anodin que Sandra Fillaudeau ait appelé son podcast "Les Équilibristes". Elle a placé le concept d’équilibre au centre de sa vision. Parce que loin d’être un concept éculé, l’équilibre vie perso vie pro est précisément à la fois l’enjeu et le levier de cette redéfinition de la valeur travail. Mobilisant la métaphore du funambule sur sa corde, elle rappelle que l’équilibre n’est pas l’absence d’activité, un état statique, mais la résultante d’une infinité de micro-mouvements quasi invisibles.

Voilà peut-être ce qui est demandé aux employeurs du monde d’après : des réglages fins.

Voilà probablement comment nous pouvons les aider en tant que cabinet de recrutement à redynamiser les vocations : en étant les yeux et les oreilles des nouvelles attentes des candidats. Trouver ensemble ces fameuses clés de leur motivation au-delà de leurs prétentions.

Parce que le détravail n’est pas le rejet du travail.

250 000 entreprises artisanales ont été créées en 2021, très souvent par d’anciens cadres ou salariés des services. Une véritable envolée (+13% par rapport à 2019) qui atteste de la force des vocations que ce secteur suscite. L’essor est plus spectaculaire encore "dans les communes rurales où la création d’entreprises a connu une belle envolée et participe pleinement à la quête de redynamisation de ces territoires" selon Marielle Vo-Van Liger, Directrice Marketing et Communication MAAF.


Et si nous n’étions pas dans une démission mais dans une réappropriation de la société et de ses structures ?

Une chose est certaine, du sourcing de talents à l’onboarding des nouveaux collaborateurs, notre rôle est plus que jamais d’être à l’écoute de ce désir de changement et de cette quête de sens. Côté candidats comme côté entreprises.

Nous avons probablement été longtemps conditionnés par cette idée que le travail c’est la vie. Nous sommes peut-être simplement entrés dans un juste rééquilibrage des choses. Lequel confère de nouvelles responsabilités aux professionnels du recrutement.

Un challenge que nous sommes non seulement disposés mais enthousiastes à relever chez Kroissance Search…

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